Arrivé chez les Gones à l'intersaison pour renforcer des Lyonnais ambitieux, Tony Vairelles n'a pas changé. De son départ de Lens, il ne regrette rien, même s'il avoue avoir eu le cœur gros en quittant le club qui l'a révélé. Portrait d'un joueur ambitieux qui a su rester simple.


Tony Vairelles
est né à Nancy un jour d'avril 1973. De cette région de l'Est, il a gardé l'esprit de solidarité qui habite les familles et l'humilité qui fait la force des anciens. Révélé à Lens, il fait partie de la génération Leclercq, lequel a dû quitter ses fonctions récemment. Comme si la perte de l'attaquant vedette des Sang et Or avait précipité la sortie de l'entraîneur qui marquera les années 90. Pas tricheur pour un sou, Tony a appris à canaliser sa fougue naturelle et doit être l'un des rares joueurs à ne pas menacer les arbitres. Triste constat qui souligne toute la qualité de l'homme avant celle du joueur.

Sa motivation : le jeu, tout simplement !

Tony sait être sage. Mais ne lui dîtes pas que c'est un ange ou encore un exemple. Il se dit tout simplement respectueux. Un point c'est tout. "On me demande souvent si c'est ma chrétienté, largement connue de tous, qui me rend comme ça. Je crois effectivement que la religion m'aide à être le plus juste et le plus honnête possible. Elle me donne aussi une vision très positive des évènements, qui me permet de ne jamais être abattu. Mais rassurez-vous, je ne suis pas un surhomme et je ne prétends pas l'être. Ou alors, c'est que je n'ai rien compris aux écritures auxquelles je tiens tant. La Bible n'est qu'une somme d'indications qui  doivent permettre à l'homme d'être meilleur. Mais j'insiste, je ne suis pas le meilleur." Et quand bien même il serait tenté de se prendre pour un autre, il sait que ses proches ont suffisamment de recul pour "le remettre en place." Alors, il sait ne pas les provoquer. Vous l'aurez deviné, la famille Vairelles veille sur le rejeton et pas seulement pour l'encenser et le féliciter de ses exploits. "Mon père et mes frères ont un regard très alerte sur le football en général et s'ils doivent me souffler dans les bronches, ils le font sans se gêner. Je ne suis pas une star, et rien que d'évoquer ce terme me met mal à l'aise. Ma famille sait m'aider à rester dans le rang tout en m'encourageant. C'est très important. Vous savez, l'équilibre d'un joueur c'est le thermomètre de sa qualité de jeu. Quoi qu'on puisse dire, on ne peut durablement être fort dans sa tête de sportif, si la vie privée n'est pas solide et saine. Quand le calendrier est chargé, que vous êtes la tête dans le guidon et que les matchs s'enchaînent, vous perdez parfois le sens des réalités. Nous sommes en permanence dans une logique de gagne implacable, que les enjeux économiques rendent parfois perverse. Nous sommes conditionnés pour vaincre coûte que coûte. C'est dans ces moments qu'il faut savoir écouter son entourage et réussir à prendre du recul et ne pas tomber dans la facilité, la nervosité, l'agressivité et les querelles à dix sous."
L'attaquant lyonnais a plus d'un Vairelles dans son sac, et il sait ce qu'il leur doit : beaucoup de soutien et une belle tendance au respect des autres. Des exemples à suivre...
Cette nécessité de se faire remonter les bretelles par papa, nous rappelle combien les footballeurs professionnels ont aujourd'hui peu de temps à s'accorder. Sollicités de toutes parts, ils en oublient qu'ils sont humains et qu'ils ont le droit de souffler.
"Mais que voulez-vous, nous ne sommes pas des victimes. Il faut bien comprendre que nous sommes des acteurs et que si nous acceptons les cadences infernales, c'est parce que nous sommes passionnés par notre métier. Voilà tout." Malgré cet aveu, Tony regrette de ne pas avoir de temps pour découvrir d'autres sports. "J'aimerais pouvoir faire plus de volley-ball et de tennis. Sans parler de tout ce qui est interdit par la Charte du footballeur, comme la moto, le ski, la plongée ou l'équitation. Mais vous savez ma carrière de sportif de haut niveau s'arrêtera avant que je n'aie les cheveux blancs. Enfin, je l'espère ! (rires), et tout ce dont je me prive aujourd'hui, j'en profiterai demain. Je ne suis pas aigri et je suis assez amoureux de mon métier pour ne pas en voir les côtés restrictifs."

Son intégration à Lyon : la méthode Delmotte !

Et le travail, la saison 1999-2000 lui en réserve des pleines brouettes ! Entre la Coupe de l'UEFA, le championnat de France et les Coupes, l'ancien lensois a dû s'intégrer au plus vite dans le collectif lyonnais et s'habituer à sa nouvelle ville. "On oublie souvent qu'après un transfert, le sportif ne peut pas avoir un rendement égal à ce qu'il offrait sous ses anciennes couleurs. C'est une question de temps, qui se gère plus ou moins rapidement et qui dépend de l'intégration sociale du joueur. " Il va sans dire que Tony a connu à son arrivée à Lyon un changement dans sa vie d'homme et qu'il n'est pas aisé  d'avoir sans délai des résultats exceptionnels et une efficacité sans faille. Surtout pour un buteur. A ce sujet, Christophe Delmotte a beaucoup fait pour faciliter  l'accueil et la bonne installation de Tony dans ses nouvelles infrastructures. "Christophe est l'un de mes meilleurs copains dans le football. C'est une chance qu'il ait été si présent et disponible pour m'aider à me sentir à l'aise, ici à Lyon. C'est un véritable ami, qui n'a pas hésité à m'inviter fréquemment quand je me retrouvais seul. Je lui dois beaucoup. Mais, il y a aussi Vikash (Dhorasoo) et Grégory (Coupet), des amis qui comptent dans la vie. Cette complicité va nous aider sur le terrain, j'en suis certain. C'est comme ça que  les grandes équipes naissent." Par ailleurs, Tony ne tarit pas d'éloge sur le reste de l'équipe et insiste sur la très bonne atmosphère qui règne à l'entraînement et qui existait déjà pendant le stage qui a précédé le début de saison. " Ces stages sont souvent capitaux et révélateurs de l'ambiance, bonne ou mauvaise, qui existe dans un groupe. Un bon signe, vous ne croyez pas?" Sûrement Tony, mais qu'est-ce qui se cache derrière ces très bonnes nouvelles ? Nous ne sommes pas sans savoir qu'il y a, à Lyon, au poste d'attaquant, deux fauteuils pour trois. Il y a le vétéran Cavéglia et la perle Anderson, et c'est le premier qui fait les frais de la concurrence accrue. "C'est vrai, mais il faut savoir que nos relations sont très saines. Alain est un professionnel, intelligent, qui sait où se situe l'intérêt du groupe et qui ne s'oppose pas au schéma de jeu proposé par Bernard Lacombe. J'espère que l'on pourra fonctionner longtemps comme ça, car c'est dans l'intérêt de l'équipe de se munir de trois attaquants potentiels." Des postes à pourvoir, voilà qui nous amène tout droit chez les Bleus.
Le débat autour des attaquants est ouvert depuis de nombreux mois, trop peut-être, et nos attaquants français font l'objet de beaucoup de critiques.
Anelka en méforme, Wiltord et Laslandes pas toujours à l'aise dans leurs crampons tricolores, Henry et Trézéguet ponctuellement  renvoyés à leurs Espoirs, le flou règne à l'avant du paquebot France, malgré la qualification pour l'Euro 2000 obtenue devant l'Islande. Et Tony Vairelles dans tout ça, il en pense quoi de l'équipe de France ?
"Sans me chercher des excuses, lors de mes 6 sélections chez les Bleus je dirais que je n'ai pas pu m'exprimer comme je le voulais. Mon but contre la Croatie est arrivé au bon moment. Je dois confirmer. Mais franchement, je ne me mets pas martel en tête. Mon objectif, c'est de jouer correctement au football, d'abord pour mon club. Ensuite, si ça veut sourire et que les sélectionneurs m'appellent pour défendre les couleurs de mon pays, je serais très honoré. C'est une chance inouïe, que de jouer avec le maillot tricolore frappé du coq et d'une étoile. La cerise sur le gâteau quoi ! "


Un sens de l'humilité qui a déjà séduit Roger Lemerre. Après sa sélection contre la Croatie, Tony peut raisonnablement espérer être un élément clef des bleus pour l'Euro 2000. C'est tout ce que l'on souhaite à ce grand monsieur du football.